Kostro vêtu de couleur sombre est assis sur un rocher dans une clairière au milieu de hautes montagnes enneigées. Et pourquoi pas ? Il peut y avoir une clairière, quelques arbres et un cercle empli de clarté au creux des montagnes. Il jette, un à un, des pétales d’une rose rouge dans l’eau d’un ruisseau qui court à ses pieds. Un ruisseau circulaire, oui, je conçois bien, cela semble étrange mais vraiment, je l’ai vu, le ruisselet tourne en rond, comme un train d’enfant. Kostro s’appuie contre une gigantesque pierre. Il se lève lorsque l’eau est devenue couleur de sang. Il s’avance vers la paroi et celle-ci s’ouvre. Un escalier grime dans une grotte assez vaste et scintillante de cristaux. Je ne peux m’empêcher de le suivre, discrètement même si je sais que je n’en ai pas le droit. C’est son histoire n’est-ce pas ? Eh ! Bien, je le suis, sans bruit, et je vois qu’il y a un étage. Kostro s’arrête là devant une porte en or où est gravé un œil entouré de rayons. Il prend son pendentif, celui que son grand père lui a offert avant de mourir, et qui représente un oeil Egyptien. Il le pose sur la sculpture et la porte d’or s’ouvre en grinçant. Dans cette salle, au milieu, un sarcophage ouvert. Couchée là, une momie ; sur son corps est posée la croix ansée. Dans cette grotte, la lumière est verte. Les murs sont gravés de hiéroglyphes. Le sol est jonché de pétales de rose rouge. Des lampions phosphorescents sont accrochés à la coupole. Le couvercle du sarcophage de marbre blanc est déposé verticalement contre l’une des parois. Sur ce côté droit de la salle, un serpent d’argent est peint, il s’enroule en spirale sur une fresque de corps humain. Au fond de la pièce, regardez ! Un tunnel ! Kostro s’engage et descend. Il marche longtemps, il fait de plus en froid. Du salpêtre humide coule sur les murs, du sable glisse sous ses pieds. On dirait que l’on entend le chant de la mer. Un petit enfant attend Kostro au pied de l’escalier taillé dans la roche. Il tient une torche allumée, le guide vers une chambre. Dans cet endroit il y a un lit de repos situé face à une table basse dont les pieds représentent des pattes de lion. Et partout des livres et des livres. Des livres rouges, des livres bleus, des livres de cuir, des parchemins, des papyrus. Kostro semble totalement ébloui. Dans un coin, un vieil homme courbé travaille. Il tient une plume d’oiseau dans la main et mélange des pigments et des poudres pour faire de l’encre. Il écrit des histoires du monde, des poèmes et des épopées. L’enfant s’assoit à ses pieds et chantonne. Le petit homme offre à Kostro un livre à la couverture verte.
À côté de la chambre, une pièce tendue de voiles sombres et au fond, un long rideau rouge qui s’ouvre par le milieu, dévoilant une niche comportant une table d’obsidienne. Dans une corbeille, des fruits et des fleurs, un serpent sui glisse en sifflant. Un cercle agrémenté de sept boules d’or tourne sur un socle. Une clepsydre dont l’eau est couleur de cerise écrasée glougloute. Contre les tentures sombres, dans l’opacité du lieu, je découvre en même temps que Kostro des statues, sept statues aux yeux qui brillent, des émeraudes ! Chacune a une tête d’animal : ibis, lion, taureau, aigle, biche, chat, vache. Les statues s’animent, oh ! J’ai eu peur, je me suis cachée derrière la première tenture. Kostro ouvrait de grands yeux et je voyais ses lèvres qui disaient sa phrase préférée : « n’ai-je donc tant navigué que pour voir cela un jour ? » Les animaux de marbre sculpté avancent à pas lourds, qui résonnent et l’entourent en dansant, comme une ronde d’enfant. À pas pesants, le temps s’intensifie. Et ils disent « anouti anouti oum nefer toum ousirew a Ptah nefer idi aaa ! amouni ouda au a dai doaou doaou mou nou roudoui doui noa ba lamini amenti daouat Seth ba daouat ma ma naouat maat soum ounou mou nefer nefer » et ainsi de suite, une mélopée lancinante, et je m’endormais, je voyais Kostro qui s’endormait debout… Et les livres volaient autour de nous, disparaissaient, devenaient poussières, les lettres devenaient oiseaux aux plumes obscures. Les statues se brisaient, éclataient en millions de particules, des étoiles vrillaient l’espace, tant de comètes qui se pulvérisaient en cet espace réduit, des vibrations secouaient le sol, Kostro ne bougeait plus. Ses yeux seulement étaient ouverts et irradiaient d’un éclat vert tandis que la momie arrivait vers lui… Tout à coup ils entraient l’un en l’autre, comme aspirés, transformés. La momie se tournait vers moi et disait : « n’ai-je donc tant navigué que pour voir cela un jour ? » Alors je prenais peur et je m’enfuyais, je courrais dans l’escalier et je me retrouvais devant le rocher. Kostro fumait sa pipe et lisait un livre à la couverture verte où se trouvait le dessin du serpent spiralé., il rit et me dit : « anouti anouti oum nefer… »
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